Vers un changement de cap économique ? Le camp présidentiel envisage des amendements à ses dogmes fondamentaux

L'équipe présidentielle est disposée à modifier certains de ses principes économiques. Le "contrat d'action" présenté mardi dernier montre quelques modifications dans ce qui est essentiel au macronisme : l'économie. Gérald Darmanin exprime également ses propres opinions sur les questions économiques.

Par Renaud HONORÉ

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Politiquement parlant, le "contrat d'initiative" présenté la semaine dernière par Gabriel Attal n'a pas connu un énorme triomphe. Juste après sa présentation, il a reçu des critiques de toutes les autres formations politiques auxquelles il était destiné, toutes pointant du doigt l'absence d'autocritique de la part du parti présidentiel. Cependant, le document révèle pour la première fois quelques changements par rapport à l'essence même du macronisme : l'économie politique.

Quelques principes de base demeurent, y compris l'engagement d'une gestion budgétaire rigoureuse et la réduction du déficit à moins de 3% du PIB d'ici 2027. De plus, la politique visant à rendre le pays plus attrayant se poursuit, grâce à la stabilité fiscale et au soutien apporté à nos entreprises innovantes.

Ouvertures vers la gauche

Cependant, le parti au pouvoir fait des avances, principalement en direction de la gauche. Le document exprime ainsi l'intention de "mettre en place un principe de droits et de devoirs pour les bénéficiaires des dépenses publiques (citoyens, entreprises, communautés) afin de les rendre responsables". En pratique, pour les entreprises, cela signifierait "établir des obligations claires en matière de création d'emplois et d'investissement".

Depuis 2017, à chaque nouvelle proposition budgétaire, les partis de gauche proposent systématiquement des modifications demandant que les subventions gouvernementales aux entreprises soient liées à des éléments tels que la création d'emplois, des propositions toujours refusées par le parti du président. Cela pourrait donc représenter un changement significatif. "L'obligation de remplir certaines conditions existe déjà pour certaines mesures (comme l'apprentissage, le crédit d'impôt recherche…). Dans le contexte de futures discussions, on pourrait envisager d'être plus rigoureux", explique Jean-René Cazeneuve, député du Gers et ancien rapporteur du Budget à l'Assemblée nationale.

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Sur le plan des impôts, le groupe Ensemble pour la République affirme être ouvert au dialogue sur certaines suggestions, telles que "l'imposition de bénéfices ou de revenus immérités pour plus d'équité fiscale", une terminologie qui semble plus vaste que la simple imposition des revenus des fournisseurs d'énergie déjà promise. "Il s'agit de profits excessifs au sens large. Cette mention est une invitation à de potentielles discussions, et non un plan concret et décidé à ce stade", soulignent les proches de Gabriel Attal.

Taxe écologique

Le document suggère une éventuelle conversation sur des "apports financiers exceptionnels pour soutenir les grandes transformations". Il semble qu'il s'agisse d'une référence à la suggestion faite en 2023 par Jean Pisani-Ferry et Selma Mahfouz dans leur étude sur le financement de la transition écologique, où ils avaient proposé l'idée d'une "taxe écologique", rapidement rejetée par Bruno Le Maire à ce moment-là. "Il reste encore à financer la transition écologique", admet Jean-René Cazeneuve, qui perçoit ces suggestions comme "non pas un changement de perspective, mais des ouvertures nécessaires".

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Gérald Darmanin, cherchant à souligner son orientation politique alignée sur le gaullisme social, exprime également un point de vue distinct sur ces sujets économiques. Il s'exprime notamment sur le SMIC, que le Nouveau Front populaire souhaite augmenter à 1.600 euros nets. « L'idée de discuter du SMIC ne me semble pas absurde. Il n'est pas possible de promouvoir une société du travail tout en négligeant cette France qui travaille dur mais ne parvient pas à s'en sortir. Cependant, cela doit se faire en collaboration avec les entreprises », déclare le ministre de l'Intérieur démissionnaire.

Patriotisme économique pour les chefs d'entreprise

Il affirme ne pas être en faveur d'une remise en question de la politique d'offre. Cependant, il admet quelques nuances. "En matière de fiscalité, nous devons également nous tourner vers le secteur numérique. Je crois qu'il est aussi essentiel de favoriser un sens du patriotisme économique au sein des entreprises. Et, soyons honnêtes, de nombreux chefs d'entreprise l'ont déjà adopté pour aider à la relance du pays ainsi qu'à relever le défi de la répartition des richesses", déclare le représentant de Tourcoing.

Finalement, l'ex-responsable du Ministère des Comptes publics estime qu'il est nécessaire de réaliser des économies, toutefois, de manière judicieuse. Il souligne qu'il serait illogique de les effectuer sur les secteurs vitaux de l'Etat comme l'Armée, l'Autorité intérieure, la Justice, et de ne pas évaluer l'efficacité des dépenses sociales qui représentent plus de 30% du PIB, et qui sont principalement supportées par ceux qui travaillent, insiste Gérald Darmanin. Il profite également de l'occasion pour critiquer Gabriel Attal en disant : "C'est la raison pour laquelle j'ai été déçu que la réforme de l'assurance-chômage ait été retirée, étant donné qu'elle reposait sur une philosophie vertueuse".

Honoré Renaud

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