Vers le plein emploi : Le CPF, un outil sous-exploité pour combler les métiers en tension

La voie du CPF pour les emplois sous pression reste largement sous-utilisée pour atteindre le plein emploi. Ce lundi, Elisabeth Borne a convoqué plusieurs ministres pour examiner de nouvelles initiatives pour stimuler l'emploi. Pour résoudre les problèmes de recrutement, Bruno Le Maire plaide pour des ajouts au compte personnel de formation (CPF), qui sont encore très restreints.

Par Alain Ruello

D'une part, la diminution du taux de chômage a stagné, et on ne peut pas déterminer si cela sera temporaire ou permanent. D'autre part, les sociétés continuent de signaler des obstacles importants pour recruter du personnel. C'est là que réside toute la contradiction de la situation de l'emploi en France, un problème que le gouvernement doit impérativement résoudre pour atteindre son but de plein-emploi d'ici 2027.

Ce lundi, Elisabeth Borne a sollicité plusieurs ministres pour qu'ils planchent sur un sujet précis. Chacun d'entre eux a apporté ses propres propositions, qui visent fréquemment les métiers dits "en tension", où les offres d'emploi surpassent le nombre de postulants. Bien que les analyses de Pôle emploi minimisent ce phénomène et que les problèmes soient souvent liés à l'employeur, la formation des travailleurs ou des demandeurs d'emploi est perçue comme un des principaux moyens d'amélioration de la situation.

Augmenter le CPF

Bruno Le Maire n'a pas attendu la rencontre à Matignon pour présenter sa proposition, qui est d'ailleurs surprenante car elle implique le compte personnel de formation (CPF), un système que Bercy n'a cessé de critiquer pour son coût croissant depuis sa conversion en euros et son indépendance de tout intermédiaire à la fin de 2019.

Les professionnels tels que les chaudronniers, les couvreurs, les soudeurs, ainsi que ceux qui travaillent dans l'industrie de la restauration et de l'hôtellerie, sont en forte demande. Il existe des centaines de milliers de postes vacants dans ces domaines sous pression. Le ministre de l'Économie a suggéré dimanche dans une interview au Parisien que pour combler ces postes, il serait judicieux d'augmenter les crédits de formation professionnelle (CPF) pour les jeunes qui aimeraient se lancer dans ces métiers.

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Dans ce contexte, la loi de 2018 sur la liberté de choisir son avenir professionnel donne déjà le pouvoir à l'Etat, une région, un secteur professionnel ou une entreprise de compléter le Compte Personnel de Formation (CPF) d'un individu lorsque le montant dans son compte n'est pas suffisant pour payer une formation. Cela est applicable, que l'individu soit jeune ou plus âgé, en emploi ou sans emploi.

Épuisant. Qu'il s'agisse de problèmes de logiciels ou de bureaucratie excessive, il est clair que les choses n'ont pas fonctionné comme prévu. La proposition initiale était prometteuse, avec l'idée de marier le désir de formation d'un travailleur et les exigences économiques d'un employeur, individuellement ou en groupe, ou d'une autorité locale.

Dans une récente entrevue avec l'agence experte AEF, Marianne Kermoal-Berthomé, la nouvelle chef des politiques sociales à la Caisse des Dépôts et Consignations (l'organisme qui gère le CPF), a admis avec preuve à l'appui, que le dispositif Mon Compte Formation et le CPF étaient initialement destinés aux employés. L'idée qu'ils pourraient servir de mécanisme de financement collectif pour la formation est plutôt récente. Techniquement, cela implique la nécessité de conclure des accords avec les régions et les secteurs professionnels.

En conclusion, la Caisse ne détient actuellement que 13 conventions d'abondement actives. En additionnant depuis la fin de 2019, le total des fonds supplémentaires est minime : environ 200 millions provenant de Pôle emploi, 70 millions de la part des régions, des secteurs et des opérateurs de compétences Opco, et environ 60 millions des entreprises. Cela représente un total de 330 millions, qui est presque insignifiant comparé aux 10 milliards investis pendant la même période par près de 7 millions de détenteurs qui ont utilisé leur compte de manière autonome !

Quatre prérequis

En d'autres termes, le CPF est un excellent moyen de permettre l'accès à l'éducation professionnelle à ceux qui étaient auparavant exclus : la proportion de personnes moins qualifiées et d'ouvriers continue de croître, comme le montre une étude récente du ministère du Travail. Cependant, l'utilisation du CPF est presque exclusivement une initiative personnelle de personnes qui ont une idée précise de la profession qu'elles souhaitent exercer.

Dans cette situation, est-ce que le concept de Bruno Le Maire pourrait mieux guider le CPF ? Il se pourrait bien, mais seulement si quatre conditions sont remplies. Premièrement, établir une liste restreinte de professions considérées comme prioritaires. Deuxièmement, ne pas être radin sur les fonds budgétaires destinés à financer les compléments (ou le paiement des salaires en cas de reconversion importante via la version transition professionnelle du CPF). Troisièmement, s'assurer que le processus est facile à mettre en œuvre. Et enfin, il faut absolument faire passer le message au public par le biais d'une campagne de communication à grande échelle.

Ruello Alain

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