Le groupe Nos Services publics a critiqué l'augmentation des travailleurs temporaires dans les universités dans un rapport publié mercredi. Le collectif accuse les établissements d'enseignement supérieur de suivre une tendance à l' "ubérisation", en employant de plus en plus de travailleurs contractuels sous-payés et en situation précaire, certains étant même considérés comme auto-entrepreneurs.
Par Leïla de Comarmond
C'est une statistique alarmante. Plus de 60% des professeurs dans l'enseignement supérieur et la recherche sont des travailleurs temporaires, selon une note publiée mercredi par le groupe Nos Services publics. Ce collectif vise à dénoncer et à lutter contre les problèmes institutionnels de nos administrations.
Ce collectif évalue leur total à 167 000 pour l'année académique 2021-2022 dans toutes les universités, un nombre qui a augmenté de 30% en sept ans. Cela doit être comparé aux 55 000 professeurs-chercheurs permanents, 13 000 professeurs permanents, et près de 20 000 professeurs à contrat.
Payés "en dessous du salaire minimum"
L'aspect distinctif de ces emplois contractuels est le petit volume d'heures travaillées : pour l'année scolaire 2020-2021, "on peut évaluer la participation des travailleurs temporaires à l'enseignement supérieur à 5,6 millions d'heures équivalentes en temps plein (soit 25% du temps d'enseignement)", souligne le groupe. Cela correspond approximativement à la même participation que celle des contractuels, qui sont huit fois moins nombreux.
Le salaire de la majorité des travailleurs intérimaires est assez bas – "inférieur au salaire minimum si vous le comparez au nombre réel d'heures travaillées" – et leur paiement est généralement retardé. Le collectif regrette que la réglementation qui exige que les salaires des professeurs intérimaires soient payés mensuellement, qui est entrée en vigueur en septembre 2022, "n'est toujours pas mise en pratique", car elle est en fait impossible à réaliser.
La situation précaire des jeunes chercheurs en attente
L'essor des emplois vacataires a un effet négatif sur le système d'enseignement supérieur, ce qui est exacerbé par leur statut particulier. Ce statut, qui n'est couvert ni par le Code du travail ni par le Code de la fonction publique, est une réalité pour de nombreux jeunes chercheurs en attente d'une position permanente. Cependant, il y a un manque de postes permanents et de contrats postdoctoraux, ce qui a tendance à prolonger cette phase de transition parfois indéfiniment, les enfermant ainsi dans une situation précaire. Le collectif dénonce cette situation et souligne que cela contribue à la diminution de l'attrait pour les carrières de recherche en France.
En savoir plus :
Plan d'austérité : comment les universités et les chercheurs seront impliqués
Le groupe met également en évidence que l'utilisation excessive de travailleurs temporaires pour répondre aux besoins de l'enseignement supérieur peut pousser l'administration publique à flirter avec l'illégalité. Ils soulignent que, théoriquement, chaque travailleur temporaire devrait avoir une autre occupation principale. Cependant, cela n'est jamais contrôlé et devient de moins en moins courant. Certaines universités incitent même les travailleurs temporaires à s'enregistrer en tant qu'auto-entrepreneurs pour éviter cette exigence, selon le groupe, qui évoque un processus d'"uberisation".
Bénéfice strictement financier
Depuis l'instauration du statut d'autoentrepreneur en 2007-2008 et l'adoption de la loi sur l'autonomie des universités, le nombre d'entreprises individuelles dans le secteur de l'éducation supérieure et de la recherche a été multiplié par six.
Augmenter le nombre de vacations offre effectivement un bénéfice financier immédiat pour les universités : cela n'est pas pris en compte dans le décompte des effectifs et permet donc de "répondre de manière artificielle aux objectifs de réduction des emplois publics en supprimant des postes du budget gouvernemental".
Consultez également :
« La France n'est pas familière avec ses universités »
Education de niveau avancé : les stratégies du gouvernement pour "certifier" les programmes d'études
Comarmond Leïla
Nouvellement disponible : explorez nos propositions haut de gamme !
Nos Clips
Est-ce que les jeunes ont vraiment du mal avec le travail ?
SNCF : est-ce que l'arrivée de concurrents peut réduire les tarifs des billets de train ?
Crise immobilière, environnement : l'habitat individuel a-t-il toujours un futur ?
Autoroutes : pourquoi les tarifs des péages montent ? (Et cela ne semble pas prêt de s'arrêter)
Les plus consultés
SONDAGE INÉDIT – Les avis des Français sont mitigés sur un durcissement supplémentaire de l'assurance-chômage
Santé : « taxe sur les lapins », gardes, remboursement du psychologue… le gouvernement précise son plan d'action
Un changement récent de l'assurance-chômage : tout ce que vous devez connaître
En vedette
Le Blue Book, le stage le plus convoité d'Europe
Boeing : la crise se propage aux avions long-courriers suite à l'intervention d'un informateur Premium
L'assurance-chômage dans l'incertitude après l'échec de la discussion sur l'emploi des personnes âgées
Social
L'assurance-chômage dans l'incertitude après l'échec de la discussion sur l'emploi des personnes âgées
La hausse du nombre de vacataires dans les universités critiquée
Emploi des personnes âgées : les acteurs sociaux échouent dans leur discussion
Utile
P
L'équipe
Toutes les permissions sont protégées – Les Echos 2024