Stagnation sociale en France : Inégalités d’accès à l’enseignement supérieur et faible mobilité intergénérationnelle de revenus

La mobilité sociale en France est moins efficace que dans d'autres pays

Une recherche réalisée par l'Institut des politiques publiques indique que le transfert de revenus entre les générations en France est l'un des plus bas parmi les nations développées. Cette stagnation est principalement due aux importantes disparités dans l'accès à l'éducation supérieure.

Par Nathalie Silbert

La France est reconnue pour sa forte redistribution. Cependant, comment se compare-t-elle aux autres nations développées en matière d'opportunités équitables? L'Institut des politiques publiques (IPP) a étudié cette problématique. Son verdict est incontestable : la France compte parmi les pays développés avec le moins de mobilité entre les générations.

"Seulement 9,7% des enfants provenant des 20% de familles les moins fortunées parviennent à se hisser parmi les 20% des foyers les plus riches à l'âge adulte", notent les analystes financiers de l'IPP.

Le pourcentage est quadruplé pour les enfants nés dans les 20% de familles les plus aisées. Environ un tiers des enfants (31,8%) provenant des 20% de foyers les plus pauvres demeurent dans la même catégorie socio-économique à l'âge adulte. Les opportunités d'amélioration sont légèrement plus élevées pour la classe moyenne.

La France se distingue en premier dans un domaine spécifique : les enfants provenant de familles à haut revenu ont plus de chances de maintenir ce statut économique.

Disparité d'accès à l'éducation avancée

Pour mener à bien leurs recherches, les scientifiques de l'IPP se sont concentrés sur la cohorte des enfants nés en France métropolitaine de 1972 à 1981. Ils ont évalué leurs revenus au sein de leur foyer entre 35 et 45 ans en les juxtaposant à ceux de leurs parents à la même période de leur vie.

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D'après l'IPP, la France est surpassée par tous les pays sauf les États-Unis en ce qui concerne la mobilité sociale. L'Italie se trouve à peu près au même niveau, mais elle se débrouille mieux en matière de mobilité vers le haut. L'Espagne, les pays nordiques (Suède, Danemark) et l'Australie figurent parmi les meilleurs. En 2018, l'OCDE avait déjà constaté que la France avait une plus grande prédisposition sociale que d'autres nations.

Selon les chercheurs de l'IPP, l'origine de cette stagnation sociale réside dans les grandes disparités d'accès à l'éducation supérieure. Le cycle de la reproduction sociale est en vigueur. "Les enfants issus de milieux défavorisés ont 2,5 fois moins de probabilités d'obtenir un diplôme supérieur par rapport à ceux issus de milieux très privilégiés", soulignent-ils.

Variabilité géographique

L'IPP souligne également une importante variabilité en termes de géographie. Les enfants nés dans des régions prospères, comme en Île-de-France ou près de la Suisse, ont un avantage car ils ont accès à plus d'opportunités pour progresser économiquement, selon son analyse. Par contre, l'influence du statut social est plus manifeste dans les Hauts-de-France, où le taux de chômage est élevé, ainsi que dans les départements de la Méditerranée.

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D'après la recherche, le changement de lieu de résidence peut être bénéfique pour les plus pauvres. Les enfants issus de familles à faible revenu qui s'installent dans des régions à revenu élevé « parviennent en général à obtenir le même niveau de revenu que les enfants de familles riches qui sont restés sur place », indique le rapport.

L'IPP tient à souligner que ses recherches viennent en complément de celles menées par l'Insee. En se concentrant sur le revenu individuel des enfants et non le revenu du foyer, Michaël Sicsic et Hicham Abbas ont démontré dans une étude parue en mai 2022 que la mobilité sociale était toujours d'actualité en France. Cela dit, ils n'ont pas nié l'impact des revenus des parents sur ceux de leurs descendants.

Nathalie Silbert

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