Loi immigration : L’impact des restrictions sur les prestations sociales sur l’aggravation de la pauvreté

Loi sur l'immigration : les limitations des aides sociales pourraient accentuer significativement la précarité

Selon plusieurs économistes, au moins 110 000 individus seraient confrontés à une réduction de leurs aides sociales si les restrictions envisagées dans la loi sur l'immigration étaient appliquées. L'impact de ces mesures est illustré à travers des exemples pratiques par le groupe "Nos services publics".

Par Leïla de Comarmond

Texte

Il existe une distinction entre la loi et la réalité. Concernant la loi sur l'immigration, la décision légale sera annoncée la semaine prochaine par le Conseil constitutionnel. De son côté, le groupe "Nos services publics" a examiné les impacts réels que pourrait avoir l'introduction d'une condition de cinq ans de résidence ou de deux ans et demi de travail pour accéder à pratiquement toutes les allocations familiales et de logement pour les étrangers non-européens, condition qui est envisagée par cette loi adoptée à la fin de l'année passée.

Ce groupe de réflexion composé de fonctionnaires souligne les disparités de situations qui peuvent découler de ces différentes circonstances. Prenons par exemple le cas de Yasmine et Saba, deux collègues de 27 ans, l'une française et l'autre originaire d'Érythrée, toutes deux mères célibataires d'un enfant d'un an. À son arrivée en France, Saba a obtenu un emploi à mi-temps en tant qu'aide-soignante et, tout comme Yasmine, elle a travaillé pendant deux ans et perçoit le salaire minimum.

Si les dispositions de la loi sur l'immigration sont mises en œuvre, Yasmine, qui gagne un salaire net de 651 euros tout comme Saba, continuera de recevoir 970 euros d'aides sociales. Ces aides comprennent une prime d'activité de 327 euros, une allocation pour soutien familial de 123 euros, une aide pour l'accueil des jeunes enfants de 182 euros et une allocation logement de 338 euros. Par contre, Saba ne bénéficiera plus d'aucune aide jusqu'à ce qu'elle puisse prouver qu'elle a travaillé pendant 30 mois.

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Le contexte est similaire si on considère deux collègues qui travaillent dans le domaine de la restauration et qui gagnent un salaire net de 912 euros chaque mois, après avoir déduit les 227 euros pour la cotisation sociale. Tandis que Matthieu, un citoyen français, continuera de recevoir une prime d'activité de 393 euros et une allocation de logement de 112 euros, Amar, un égyptien qui a immigré en France en 2023, verra son salaire diminuer d'environ 500 euros par mois. Il est important de souligner que l'élimination de la prime d'activité sera appliquée même si Amar est marié à un(e) conjoint(e) qui est soit français(e) soit résidant en France depuis une longue période.

La disparité apparaît encore plus manifeste parmi les enfants

La disparité de traitement est particulièrement marquée lorsqu'on examine la situation des enfants de diverses nationalités, comme Antoine et Brian, ainsi que des enfants français tels que Sofia, qui a deux parents français, et Ismaël, qui ne se trouve pas dans cette situation.

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Ces illustrations n'ont pas été sélectionnées par pur hasard. Elles démontrent l'évaluation financière des conséquences de la loi, effectuée par quatre érudits. Parmi eux, Elvire Guillaud et Muriel Pucci de l'Université Paris 1, Antoine Math de l'IRES et Michaël Zemmour de l'Université Lyon 2, qui a largement attiré l'attention des médias lors de la réforme des pensions.

D'après leur évaluation soumise au Conseil constitutionnel, la réforme telle qu'elle est actuellement envisagée toucherait 110.000 personnes, en ne comptant que les ménages où le chef de famille et son partenaire sont des étrangers non européens. Si l'on inclut les ménages où un seul membre est un étranger non européen récemment arrivé, ce chiffre grimpe jusqu'à 700.000 personnes concernées.

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L'étude met également l'accent sur l'impact majeur que les limitations des aides sociales auront sur les enfants, mentionnant un chiffre potentiel de 210 000 touchés. Cependant, il est précisé que le nombre réel est probablement plus proche du minimum de cette estimation, qui est de 31 000.

Augmentation importante de la pauvreté et de sa sévérité

Dans leur analyse, les spécialistes en économie soulignent l'impact significatif de la loi sur la pauvreté en général. Le pourcentage de personnes dont les revenus sont moins élevés que 60% du niveau de vie médian passerait de 58% à près de 66%. En outre, le taux de pauvreté extrême (40% du revenu médian) passerait de 22% à 39%. Ces pourcentages augmenteraient spécifiquement pour les enfants, passant de 72% à 81% pour la pauvreté et de moins de 27% à 53% pour le taux de pauvreté extrême.

En ce qui concerne la gravité de la pauvreté, elle s'accentuerait considérablement, étant donné que la moitié des individus en situation de pauvreté devraient se contenter d'un revenu par unité de consommation inférieur à 600 euros, comparé à 810 euros avant la mise en place de la réforme.

Comarmond Leïla

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