Avec la loi relative à l’énergie et au climat de 2019, les propositions de la Convention citoyenne pour le climat de 2020, et la loi climat qui va arriver dans les prochaines semaines, ce sont de nouvelles contraintes qui vont frapper les propriétaires. L’Etat français souhaite faire disparaître les « passoires thermiques » en imposant des travaux parfois considérables, et dans un laps de temps assez restreint. C’est près de 30 % des logements locatifs privés qui pourraient disparaître à défaut de travaux.
Sommaire
– Des logements exclus du marché dans 2 et 7 ans
– Une exclusion des prix de marché
– Des annonces de location complexifiées
– Une baisse massive du parc locatif
Des logements exclus du marché dans 2 et 7 ans
Afin de lutter contre le réchauffement climatique, l’Etat français souhaite supprimer tous les logements énergivores, soit une partie des plus anciens. Pour cela, des travaux de rénovation devront être effectués par les propriétaires, sous peine de ne plus pouvoir louer.
Dès le 1er janvier 2023, un logement ne pourra être mis en location que si la consommation d’énergie ne dépasse pas le seuil de 449 kilowattheures par mètre carré de surface habitable, par an. Les logements classés G (classe énergétique la plus basse) seront donc interdits à la location dans à peine deux ans seulement.
Et à partir du 1er janvier 2028, le seuil de consommation énergétique ne pourra pas dépasser 300 kWh/m2/an. Ainsi, les logements classés F seront à leur tour exclus du marché. Les sanctions restent à définir, mais on peut craindre le pire…
Une exclusion des prix de marché
Des travaux devront en conséquence être réalisés par les propriétaires de biens immobiliers classés F et G. Des aides existent, mais elles seront sans doute loin d’être suffisantes pour les travaux lourds. Impossibilité d’effectuer les travaux, donc impossibilité de louer, c’est le sort qui attend certains petits propriétaires. Ceux qui ont des moyens suffisants se diront que pour rentrer dans leurs frais, ils augmenteront les loyers. Ce sera possible en zone non tendue – mais cette hausse (normale) du prix combinée au manque cruel de logements en France pourrait exclure les locataires modestes du marché. En revanche, en zone tendue, c’est une autre affaire, même après travaux…
Car dans ces zones, le propriétaire a l’interdiction d’augmenter le loyer de son bien entre deux locataires, sauf si d’importants travaux de rénovation autres que ceux qui sont exigés par la loi sur les passoires thermiques ont été effectués, ou s’il prouve (et c’est difficile) que le loyer est sous-évalué.
En outre, depuis le 1er janvier de cette année, la relocation est très encadrée.. Zone tendue ou pas, on ne peut augmenter le loyer d’un logement « énergivore » entre deux locataires, même s’il était sous-évalué, ni même après avoir effectué de gros travaux. De quoi décourager les propriétaires de rénover leur logement… Et donc les dissuader de mettre leur appartement ou maison à louer… C’est un cercle vicieux. Une baisse du nombre d’habitations dans des territoires où l’offre ne peut déjà pas répondre à la demande, voilà ce que ces deux obligations vont entraîner…
Des annonces de location complexifiées
Les annonces de location ne vont pas échapper au « greenwashing ». Dès le 1er juillet prochain, elles devront mentionner les classements énergétique (quantité annuelle d’énergie consommée ou estimée) et climatique (quantité annuelle indicative de gaz à effet de serre émis).
Et à partir du 1er janvier 2022, elles devront en plus indiquer le montant des dépenses énergétiques théoriques annuelles. Il faudra donc calculer, en moyenne, la consommation d’électricité, de chauffage, etc. Pourtant, la consommation varie (parfois beaucoup) d’un locataire à un autre. Que se passera-t-il pour le propriétaire si ses locataires dépassent l’estimation moyenne de chauffage qu’il a indiquée, parce qu’ils aiment les températures tropicales ?
Pour simplifier le tout, il faudra aussi préciser l’année de référence des prix de l’énergie utilisés pour établir l’estimation. Le bail mentionnera lui aussi ces estimations de consommation et de prix. Les logements classés F et G seront discriminés, avec une mention « Logement à consommation énergétique excessive » présente sur l’annonce et le contrat de location.
Cette obligation d’information dans les annonces sera bien évidemment assortie d’une lourde amende en cas de non-respect, comprise entre 3.000 à 15.000 €. Elle va donc obliger les propriétaires à passer par une agence immobilière, ce qui entraînera des frais supplémentaires pour eux comme pour les futurs locataires. Les annonces entre particuliers diminueront de par leur complexité.
Une baisse massive du parc locatif
Les annonces diminueront. Les locations également. Le calendrier fixé par le gouvernement est irréaliste. Le président de l’UNPI (Union nationale des propriétaires immobiliers), Christophe Demerson, estime que ces obligations de mise en conformité énergétique pourraient faire disparaître près de 30 % du parc locatif privé ! Détruire de l’offre locative, c’est limiter la capacité des Français, notamment des plus modestes, à se loger. La lutte contre le changement climatique se transforme en lutte contre les plus modestes (locataires comme propriétaires).
Plutôt que d’imposer des rénovations dans un délai très court, l’Etat devrait plutôt encourager la construction d’habitations neuves, sociales ou non, en libérant le secteur de beaucoup de contraintes réglementaires et fiscales. L’Etat ponctionne d’ailleurs le secteur immobilier à hauteur de 80 milliards d’euros par an. S’il réduisait ces prélèvements obligatoires, il donnerait les moyens aux propriétaires privés de rénover et construire.
Sources :
Christophe Demerson, « Rénovation énergétique : pistolet sur la tempe pour les propriétaires. », 25 millions de propriétaires, Numéro 548, Février 2021, p. 3.
https://www.pap.fr/actualites/logem …