Dépenses publiques : une augmentation en faveur des retraités au détriment de la jeunesse depuis 30 ans

Les dépenses publiques favorisent davantage les personnes âgées au détriment des jeunes depuis trois décennies. Selon une analyse effectuée par le site Fipeco, sur 1 000 euros de taxes et impôts, environ 560 euros ont été alloués à la sécurité sociale en 2022. Depuis 1995, la part des dépenses dédiée aux pensions de retraite a connu une hausse, ce qui a réduit notamment les investissements dans l'éducation. Le secteur de la Défense a également subi des pertes durant cette période.

Par Renaud Honoré

Quel est l'usage de l'argent des contribuables ? Cette interrogation est de plus en plus récurrente, alors que les critiques envers certains services de l'État s'intensifient. Suite à la crise des "gilets jaunes", le gouvernement avait déjà mené une campagne d'information à ce sujet. Au cours du printemps précédent, Gabriel Attal, qui était alors ministre des Comptes publics, avait initié la campagne "en avoir pour mes impôts" dans le but d'éclairer les contribuables et de recueillir leurs avis sur de possibles mesures d'économie. Néanmoins, il n'est pas certain que des actions politiques aient été mises en place suite à ces deux événements.

Le rapport publié ce jeudi par Fipeco, le site expert en finances publiques, donne une vue d'ensemble précise de la situation en mettant en évidence les principaux courants qui ont prévalu ces trente dernières années. En simplifiant, on pourrait avancer que la décision collective prise par la France depuis le milieu des années 1990 est d'augmenter considérablement les dépenses pour les retraités, au détriment en particulier des plus jeunes.

L'importance croissante des dépenses liées à la sécurité sociale, en particulier les pensions de retraite, est un phénomène notable, selon François Ecalle, ancien juge à la Cour des comptes et créateur du site. Il note également que les dépenses consacrées à l'éducation ont diminué depuis 1995. Le secteur de la Défense est un autre domaine qui a souffert de coupes budgétaires au cours de cette période, malgré les efforts d'Emmanuel Macron pour augmenter le financement depuis qu'il est président.

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La note a tenté de comprendre comment sont utilisés nos contributions obligatoires, qui comprennent à la fois les taxes et les cotisations sociales payées. Sur 1.000 euros de contributions obligatoires, 563 euros ont été alloués aux dépenses de protection sociale en 2022. Dans ce domaine large, on trouve 247 euros pour les pensions de retraite et 209 euros pour la santé, alors que 37 euros sont dédiés aux familles et 29 euros aux allocations chômage.

Cette grosse somme d'argent englobe principalement le deuxième plus grand poste de dépenses dédié au soutien des activités économiques, qui s'élève à 116 euros. Ce dernier couvre une grande variété de domaines, incluant aussi bien des aides générales à la production, évaluées à 28 euros, des subventions pour le transport s'élevant à 35 euros, que des contributions pour le développement des énergies renouvelables, estimées à 23 euros.

Éducation en déclin

L'éducation est la dernière sur le podium, avec 90 euros alloués sur les 1000 euros de cotisations obligatoires. Pour les services publics essentiels, la police et la justice reçoivent 30 euros tandis que la défense obtient 35 euros. La préservation de l'environnement est à la traîne avec seulement 19 euros, même si en vérité, les coûts sont plus élevés et sont répartis dans d'autres secteurs.

Si on fait une comparaison avec la situation qui prévalait en 1995, certaines évolutions claires se font remarquer. Au cours des trois dernières décennies, les dépenses allouées à la Défense ont connu une réduction d'un tiers, passant de 46 à 31 euros. Pendant ce temps, les dépenses pour l'environnement ont connu une petite hausse, passant de 11 à 18 euros. En ce qui concerne les services généraux – essentiellement les dépenses de fonctionnement de l'Etat – ils s'établissent à 67 euros, ce qui est moins que ce que le public pourrait penser.

Problème de dépenses structurelles

C'est surtout le bouleversement des proportions entre les différentes générations qui est frappant. Les coûts pour les services sociaux destinés aux personnes âgées ont augmenté de 224 à 247 euros (+10 %), tandis que les dépenses pour la santé (également stimulées par le vieillissement de la population), ont grimpé de 180 à 209 euros. En revanche, pour les jeunes, c'est plutôt une situation décevante : les dépenses pour l'éducation ont diminué de 105 à 90 euros en trente ans (-14 %), et on peut aussi observer une attention réduite accordée aux familles (48 euros en 1995, contre 37 euros maintenant).

"La dette publique de la France est une préoccupation pour ses finances, mais elle doit également faire face à une question plus fondamentale liée à l'utilisation de ses dépenses, qui ne planifie pas suffisamment pour l'avenir", déclare François Ecalle. Selon cet ex-juge de la Cour des comptes, cette situation inhabituelle devrait inciter le gouvernement à réfléchir, surtout à l'heure où il cherche déjà à économiser 12 milliards d'euros pour le budget de 2025.

"François Ecalle pense qu'il serait logique et juste de désindexer partiellement les pensions de retraite par rapport à l'inflation, compte tenu des décisions prises par le gouvernement pour sa réforme. De toute évidence, par crainte de mécontenter les électeurs qui le soutiennent, Emmanuel Macron avait complètement dispensé les retraités actuels de toute contribution à cet effort."

Honoré Renaud

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