Repenser la prise en charge des maladies chroniques : un défi pour la pérennité du système de santé français

Santé: envisager une nouvelle approche pour la gestion des maladies chroniques

Un document officiel propose de différencier les patients atteints de maladies chroniques qui requièrent des soins très onéreux de ceux qui ont besoin d'un suivi régulier, mais qui n'auraient pas besoin d'une couverture complète. Un sujet délicat.

Par Solenn POULLENNEC

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L'avenir d'un pilier essentiel du système de santé français pourrait être en péril. Alors que la Sécurité sociale assure une bonne couverture des frais médicaux pour les personnes atteintes de maladies chroniques actuellement, la capacité du système à maintenir cet équilibre financier n'est pas garantie, alerte un document officiel publié récemment. Ce rapport appelle à une transformation en profondeur du système, même si les économies potentielles sur ce sujet délicat ne sont pas énormes.

Actuellement, presque un cinquième de la population française profite du système renforcé de l'Assurance Maladie, conçu pour ceux qui souffrent d'une ou plusieurs maladies chroniques, selon un rapport établi par les inspections financières et sociales. En pratique, ces personnes atteintes de diabète, d'insuffisance respiratoire, de tumeurs ou de maladies psychiatriques, n'ont pas à payer la part des soins qui est généralement à la charge des assurés, une somme habituellement remboursée par les mutuelles.

Un examen de la recherche d'économies qui fait l'objet de critiques

En raison des systèmes de franchises et de forfaits hospitaliers, les soins pour les patients atteints de maladies chroniques ne sont pas entièrement couverts par la Sécurité sociale. Cependant, leurs coûts sont grandement réduits. Même si ce système, qui existe depuis la création de la Sécurité sociale, est considéré comme "efficace", l'Igas et l'IGF expriment leurs préoccupations. En effet, avec l'augmentation de l'espérance de vie et la progression des maladies chroniques, le nombre de patients en affection de longue durée (ALD) continue de croître à un taux de 2,7 % par an entre 2010 et 2022. Par conséquent, le coût pour les finances publiques augmente également. Rien qu'en 2021, la couverture spécifique pour les ALD (c'est-à-dire la suppression du ticket modérateur) représentait plus de 12 milliards d'euros, sur un total de 83 milliards d'euros de dépenses liées aux ALD.

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Alors que les finances publiques s'endettent davantage, le gouvernement précédent avait requis de l'administration de trouver des moyens d'économiser sur les dépenses liées aux Affections de Longue Durée (ALD), avec l'objectif d'y parvenir idéalement d'ici 2025. Les inspections ont donc envisagé diverses méthodes pour alléger la pression sur le budget public, par exemple en suggérant de supprimer certaines dispenses de paiement, en particulier pour l'achat de paracétamol. Cependant, elles tempèrent leurs propositions en soulignant que les économies potentielles sont "limitées sauf à modifier fondamentalement le système" et risquent d'accroître les frais des assurés, notamment par une augmentation des primes exigées par les mutuelles.

Même avant la dissolution, la recherche d'économies sur la prise en charge des Affections de Longue Durée (ALD) avait provoqué un tollé parmi les opposants politiques et les groupes de patients. Malgré le "déficit" qui ne cesse de s'aggraver dans les finances de la Sécurité sociale, il semble peu plausible que le gouvernement de Michel Barnier, qui se trouve dans une situation instable en raison de l'absence de majorité à l'Assemblée, tente de réaliser des économies en s'attaquant de front à un sujet aussi délicat.

Deux types de prise en charge

Toutefois, l'Igas et l'IGF estiment qu'une réforme radicale est « nécessaire ». En plus de l'augmentation des coûts du système, les inspections prédisent que son « acceptabilité sociale pourrait se détériorer » et qu'il ne souligne pas suffisamment l'importance de la prévention en matière de santé. D'où l'une de leurs suggestions qui consiste à envisager deux types de prise en charge des Affections de Longue Durée (ALD) plutôt qu'un seul, basé sur le profil des patients.

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EXAMEN – Affections durables et incapacités cachées : faut-il en discuter au bureau ou pas

Les patients souffrant de conditions moins graves, qui n'ont pas besoin de traitements extrêmement coûteux – comme les diabétiques sans complications ni traitement par injection -, devraient généralement payer une charge modérée (probablement couverte par leur assurance) comme les autres assurés. Ces patients en Affection de Longue Durée de "niveau 1" ne bénéficieraient pas d'un remboursement intégral pour leurs déplacements de santé.

Par contre, ils seraient dispensés de payer la part non remboursée par l'assurance maladie pour plusieurs "actes de prévention". Le niveau de couverture supérieur, "de niveau 2", se concentrerait sur les cas les plus graves de maladies et les traitements "extrêmement intensifs et onéreux".

L'Igas et l'IGF recommandent de faire preuve de circonspection en ce qui concerne l'estimation du coût de la réforme suggérée. Si leurs recommandations étaient mises en œuvre et la réforme était appliquée à tous les patients actuellement en ALD, plus de 4 millions de personnes assurées pourraient perdre l'accès à la couverture maximale et devraient se tourner vers leur mutuelle pour couvrir les soins actuellement couverts par la Sécurité Sociale.

Il faut cependant noter que la prise en charge de traitements spécifiques pour les patients chroniques moins graves aurait également un coût. Ainsi, l'économie nette pourrait s'élever à environ 265 millions d'euros chaque année. Ce n'est pas suffisant pour équilibrer le déficit de la Sécurité sociale. Bien que le nouvel arrangement vise à améliorer la prévention pour éviter des dépenses supplémentaires.

Solenn Poullennec

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