Michel Barnier face à l’urgence budgétaire: un défi pour le nouveau Premier ministre

Michel Barnier est pris dans une course contre la montre financière. Le gouvernement a sollicité une prolongation auprès de Bruxelles pour la soumission de son plan financier jusqu'en 2027. Cela ne donne pas encore d'indication sur la décision à prendre concernant le respect du calendrier pour la présentation du budget 2025 le 1er octobre. En ce qui concerne ce document, le Premier ministre se montre favorable à une "équité fiscale accrue".

Par Renaud HONORÉ

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Dès son entrée à Matignon, Michel Barnier se retrouve en pleine course contre la montre budgétaire. Il va devoir, dans un futur proche, prendre une série de décisions clés concernant le futur projet de loi de finances (PLF) pour 2025, qui sera déterminant pour la suite de sa carrière politique.

Une première action a déjà été mise en œuvre pour assouplir le programme exigeant qui lui fait face. Comme le rapporte "La Tribune Dimanche", le gouvernement a sollicité un délai supplémentaire de la Commission européenne pour la soumission de sa stratégie budgétaire. Paris, maintenant soumis à une procédure pour déficit excessif, avait normalement jusqu'au 20 septembre pour communiquer à Bruxelles ses plans pour redresser les finances publiques et la vitesse à laquelle il prévoyait de le faire. Cependant, il était irréalisable de s'engager dans une telle tâche, alors que les décisions concernant le budget de l'année prochaine, qui détermineront la suite, et même pour les comptes 2024, qui risquent de se détériorer encore en l'absence de mesures d'économie prises rapidement, n'ont pas encore été prises.

Difficulté à respecter l'échéance

Le premier retard pourrait-il en entraîner un autre, cette fois concernant la présentation du budget 2025 ? Celui-ci est normalement prévu pour le 1er octobre à l'Assemblée nationale, mais les équipes de l'ancien Premier ministre Gabriel Attal avaient envisagé la possibilité de reporter la date de quelques jours. Cependant, cette idée rencontre déjà l'opposition des sénateurs qui craignent que cela entraîne une réduction du temps d'examen du texte par le Sénat. "La question du délai européen n'a pas de lien direct avec le calendrier interne" concernant le PLF, déclare un membre du nouveau gouvernement.

Il est indéniable que le respect de l'échéance du 1er octobre semble de plus en plus compliqué. Selon le planning initial, le document devait être transmis au Haut Conseil des finances publiques (HCFP) avant vendredi, dans le but de le présenter fin septembre lors d'une réunion du Conseil des ministres. Il est fort probable que cette échéance ne soit pas respectée. Un initié du dossier déclare : "Il est toujours possible d'avoir un PLF pour le 1er octobre, mais le délai est serré, avec une transmission au HCFP possible jusqu'au 20 septembre".

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Cela donne donc environ dix jours pour élaborer un texte budgétaire en situation d'urgence. Est-ce que cela vaut vraiment la peine? Le président du HCFP, Pierre Moscovici, préconise de se concentrer sur les questions essentielles plutôt que de se conformer strictement au calendrier. Dans une interview accordée au "Parisien" ce dimanche, il plaide pour un "véritable projet de loi de finances complet et détaillé", rejetant la notion "d'une structure dépensière constante qui serait ensuite modifiée".

"Objectif 2027" obsolète

Le gouvernement sortant de Gabriel Attal avait posé les premières pierres pour la partie dépenses du budget de l'Etat – avec une stabilisation des fonds par rapport à 2024 – dans le but de simplifier la tâche de son remplaçant. Cependant, Pierre Moscovici exhorte à enrichir le projet, estimant que "cela n'amaigrirait pas assez le déficit". "Il est nécessaire d'avoir un changement, ou du moins un tournant très marqué" pour la diminution du déficit l'année suivante, estime celui qui est également le premier président de la Cour des comptes.

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Cependant, le remède ne doit pas être trop dur à avaler. Pour l'ancien responsable européen, l'objectif de ramener le déficit à moins de 3% du PIB d'ici 2027 est "obsolète", "peu probable et pas nécessairement souhaitable". Un rapport du Trésor cet été indiquait qu'il faudrait réaliser 110 milliards d'euros d'économies en trois ans pour maintenir cette trajectoire. "C'est sévère, politiquement difficile à réaliser, socialement peu acceptable et économiquement peu logique", a déclaré Pierre Moscovici.

Les décisions budgétaires attendues de Barnier

Michel Barnier est attendu pour prendre des décisions importantes. Pour accélérer le processus, il peut compter sur Jérôme Fournel, son chef de cabinet, qui est très bien informé sur le sujet. En effet, jusqu'à la semaine dernière, Fournel était le chef de cabinet de Bruno Le Maire et a donc joué un rôle clé dans la conception du premier projet concernant les dépenses de l'Etat.

On attend désormais de voir comment Michel Barnier va laisser sa marque sur ce projet initial. Des signes préliminaires concernant ses plans ont commencé à apparaître ce week-end. Samedi, lors de sa visite au Samu de Paris, il a affirmé qu'il y avait des possibilités d'économies, tout en mettant l'accent sur la possibilité d'améliorer l'efficacité des dépenses publiques. Vendredi soir, lors de son apparition sur TF1, il a exprimé son soutien à une meilleure équité fiscale. Est-ce un changement de cap depuis l'accession à la présidence d'Emmanuel Macron en 2017, qui a toujours été contre toute augmentation d'impôts ? Au sein du parti présidentiel, plusieurs personnes sont convaincues que la politique fiscale est un outil inévitable compte tenu de l'importance du déficit.

Honoré Renaud

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