Liquidation judiciaire

I. CONDITIONS DE LA LIQUIDATION JUDICIAIRE
A) Qui est concerné?

La procédure de liquidation judiciaire est applicable à :

  • toute entreprise commerciale, artisanale, agricole ou libérale (personne physique ou morale) ;
  • et aux personnes morales de droit privé (une association par exemple).

Ces personnes doivent être en état de cessation des paiements, c’est-à-dire dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec l’actif disponible, et le redressement judiciaire doit être manifestement impossible.

La liquidation judiciaire est soit de droit commun soit simplifiée.

B) Liquidation judiciaire simplifiée

La liquidation judiciaire simplifiée a été introduite par la loi du 26 juillet 2005, elle est plus rapide et moins coûteuse.

1 Liquidation judiciaire simplifiée obligatoire

Depuis l’ordonnance du 18 décembre 2008, la liquidation judiciaire simplifiée est obligatoire lorsque les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies:

– absence d’actif immobilier;

– un seul salarié;

– chiffre d’affaires hors taxes inférieur ou égal à 300 000 euros.

2 Liquidation judiciaire simplifiée facultative

Le tribunal peut décider d’ouvrir une procédure simplifiée dès lors que les trois conditions cumulatives suivantes sont réunies à savoir:

– absence d’actif immobilier;

– effectif ne dépassant pas cinq salariés;

– et un chiffre d’affaires hors taxes compris entre 300 000 et 750 000 euros.

C) Durée de la liquidation judiciaire

Pour la liquidation judiciaire de droit commun, le tribunal fixe un délai au terme duquel la clôture de procédure devra être examinée. Si ce délai ne peut être respecté, le tribunal peut le proroger par décision motivée. A l’expiration d’un délai de deux ans à compter du jugement de liquidation judiciaire, tout créancier peut également saisir le tribunal aux fins de clôture de la procédure.

S’agissant de la liquidation judiciaire simplifiée, la procédure est clôturée au plus tard un an après l’ouverture de la liquidation par le tribunal.

Attention: à tout moment, le tribunal peut décider de revenir à la procédure de droit commun par jugement spécialement motivé.
II Documents à fournir pour l’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire
Le tribunal détermine la date de cessation des paiements. S’il ne peut la fixer avec précision, elle est réputée être intervenue à la date du jugement qui la constate.
A) La personne habilitée à faire la demande d’ouverture de la liquidation judiciaire

Le représentant légal de la personne morale (c’est à dire le gérant de la SARL, le dirigeant de SAS, le président du conseil d’administration de SA) ou l’entrepreneur individuel s’adresse au greffe du tribunal compétent au plus tard dans les quarante cinq jours qui suivent la cessation des paiements pour demander l’ouverture de la liquidation judiciaire. Il fournit un certain nombre de documents (voir ci-après) qui doivent être datés, signés et certifiés sincères et véritables par le représentant de  l’entreprise.

B) Les pièces à fournir au tribunal

L’ouverture de la procédure de liquidation judiciaire nécessite, outre les comptes annuels du dernier exercice, la fourniture des documents suivants:

– l’état du passif exigible et de l’actif disponible ainsi qu’une déclaration de cessation des paiements;

– un extrait d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés;

– une situation de trésorerie de moins d’un mois (c’est à dire un documents comptable qui établit les dettes et les créancesde l’entreprise et qui permet de connaître sa situation exacte);

–  le nombre de salariés employés à la date de la demande, le nom et l’adresse de chacun d’entre eux;

– le montant du chiffre d’affaires apprécié à la date de clôture du dernier exercice comptable;

– l’état chiffré des créances et des dettes avec l’indication du nom et du domicile des créanciers et, pour les salariés, le montant global des sommes impayées;

– l’état actif et passif des sûretés (c’est à dire les garanties accordées aux créanciers pour le recouvrement de leurs créances) ainsi que celui des engagements hors bilan;

– l’inventaire sommaire des biens du débiteur;

– s’il s’agit d’une personne morale comportant des membres responsables solidairement des detets sociales, la liste de ceux-ci avec l’indication de leur nom et domicile;

– le nom et l’adresse des représentants du comité d’entreprise ou des délégués du personnel habilités à être entendus par le tribunal s’ils ont déja été désignés;

– une attestation sur l’honneur certifiant l’absence de désignation d’un mandataire ad hoc ou d’ouverture d’une procédure de conciliation dans les 18 mois précédant la date de la demande (dans le cas contraire, une attestation sur l’honneur faisant état d’une telle désignation ou de l’ouverture d’une telle procédure en mentiionnant sa date ainsi que le tribunal qui y a procédé;

– la copie de la décision d’autorisation ou la déclaration, lorsque le débiteur exploite une ou des installations classées au sens du titre 1er du livre V du Code de l’environnement.

III Organes de la procédure

Le tribunal désigne dans le jugement d’ouverture:

– un juge-commissaire;

– un liquidateur;

– un représentant des salariés (pour plus de détails, vous pouvez vous reporter aux articles L. 621-4 alinéa 2 et R. 621-14 du Code de commerce);

Par ailleurs,  le juge-commissaire désigne de un à cinq contrôleurs parmi les créanciers qui lui en font la demande.

A) Nomination et mission du liquidateur

1) Qui est le liquidateur?

Dans le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire, le tribunal nomme en qualité de liquidateur un mandataire judiciaire inscrit sur une liste spéciale ou toute autre personne justifiant d’une expérience ou une qualification particulière au regard de la nature de l’affaire et remplissant certaines conditions de nationalité, de probité et de diplômes.

Attention: Le ministère public peut proposer un liquidateur. Si le tribunal rejette la proposition, celle-ci doit être motivée.

Lorsque la procédure de liquidation judiciaire est ouverte à l’égard d’une société ou d’un entrepreneur individuel qui bénéfic ie ou a bénéficié d’un mandat ad hoc ou d’une procédure de conciliation dans les 18 mois qui ont précédé, le Ministère public peut s’opposer à ce que le mandataire ad hoc ou le conciliateur soit désigné en qualité de liquidateur.

2) Mission du liquidateur

Le liquidateur exerce, à la place du représentant légal de la société ou de l’entrepreneur individuel, ses droits et actions sur son patrimoine, pendant toute la durée de la liquidation. Il tient informé, au moins tous les trois mois, le juge-commissaire, le ministère public et le dirigeant de la société mise en liquidation judiciaire du déroulement des opérations.

Dès l’ouverture de la procédure, le liquidateur fait procéder à l’inventaire et fixe le prix des biens de la société ou de l’entreprise individuelle ainsi que des garanties qui les grèvent. Il procède également à la vérification des créances en même temps qu’il effectue les opérations de liquidation.

Il procède également aux actes conservatoires préservant les droits du dirigeant ou de l’entrepreneur individuel sur ses propres débiteurs.

Le liquidateur peut également introduire ou poursuivre les actions qui relèvent de la compétence du mandataire judiciaire. C’est également lui qui procède aux licenciements. Toute somme reçue par le liquidateur dans l’exercice de ses fonctions est immédiatement versée en compte de dépôt à la Caisse des dépôts et consignations.

B) Nomination et mission du juge-commissaire

Dans le jugement qui ouvre la liquidation judiciaire, le tribunal désigne un juge-commissaire qui est chargé de veiller au  déroulement rapide de la procédure et à la protection des intérêts en présence.

Le juge-commissaire statue sur les contestations relatives au projet de répartition des créances. Dans les ventes d’immeuble, c’est le juge-commissaire qui fixe la mise à prix et les conditions essentielles de la vente et détermine  les modalités de publicité. Pour les autres biens de l’entreprise, le juge-commissaire organise la vente aux enchères ou la vente de gré à gré.

Depuis l’ordonnance du 18 décembre 2008, le juge-commissaire peut autoriser la cession de biens mobiliers de faible valeur nécessaire aux besoins de la vie courante à des personnes proches du dirigeant ou de l’entrepreneur individuel

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IV Sort de l’entreprise

La société qui fait l’objet d’une liquidation judiciaire subit diverses modifications. En principe, les dirigeants sociaux de celle-ci restent en place sauf dispositions contraires des statuts ou de l’assemblée générale. Durant la phase de  liquidation de l’entreprise individuelle, l’entrepreneur individuel ne peut exercer une activité de commerçant, artisan, agriculteur ou profession libérale mais peut avoir une activité salariée.

A) Administration de l’entreprise

Le liquidateur administre l’entreprise (avec l’aide d’un administrateur judiciaire en cas de dépassement de certains seuils). Les contrats en cours ne sont pas résiliés du seul fait de la liquidation judiciaire et le liquidateur suit le régime prévu par l’article L. 641-11 alinéa 1 du Code de commerce.

S’agissant du contrat de bail, le liquidateur peut continuer le bail ou le céder. Dans cette dernière hypothèse, la clause de solidarité (qui permet au propriétaire de poursuivre le vendeur du bail en recouvrement des loyers impayés par le repreneur) est réputée non écrite.

B) Arrêt des poursuites individuelles

Le jugement d’ouverture interrompt ou interdit toute action en justice tendant à la condamnation du dirigeant ou de l’entrepreneur au paiement d’une somme d’argent ou à la résolution d’un contrat pour défaut de paiement.

Toutes les voies d’exécution des créanciers tant sur les meubles que sur les immeubles sont neutralisées.

C) Arrêt du cours des intérêts

Le jugement d’ouverture arrête le cours des intérêts légaux et conventionnels ainsi que celui de tous les intérêts de retard et majorations.

V Sort des créances antérieures et postérieures et règlement des créanciers

Le jugement ouvrant la procédure de liquidation judiciaire emporte de plein droit l’interdiction de payer toute créance née antérieurement au jugement d’ouverture (sauf compensation de créances connexes quand deux personnes sont créancières et débitrices l’une de l’autre, ce qui permet d’éteindre les deux dettes à concurrence de la plus faible).

A) Sort des créances antérieures

Dans un délai de deux mois à compter de la publication du jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire,  tous les créanciers qui disposent d’une créance née antérieurement au jugement d’ouverture doivent adresser une déclaration de créances au liquidateur.

Ce délai est augmenté de deux mois pour les créanciers domiciliés hors de France lorsque la procédure est ouverte par une juridiction qui a son siège sur le territoire de la France.

B) Sort des créances postérieures

Les créances nées régulièrement après le jugement d’ouverture de la liquidation judiciaire pour les besoins du déroulement de la procédure ou du maintien provisoire de l’activité ou en contrepartie d’une prestation fournie à l’entreprise mise en liquidation judiciaire sont payées à leur échéance.

Le juge-commissaire peut autoriser le liquidateur, ou l’administrateur s’il en a été désigné un, à payer des créances antérieures au jugement pour retirer le gage ou la chose légitimement retenue ou lorsque le paiement à intervenir est inférieur à la valeur vénale du bien, objet du contrat, pour lever l’option d’achat d’un contrat de crédit bail.

Si elles ne sont pas réglées à leur échéance, les créances postérieures sont payées par privilège avant toutes les autres créances à l’exception du super privilège des salaires, des frais de justice nés régulièrement après le jugement d’ouverture pour les besoins du déroulement de la procédure, du privilège de la conciliation.

C) Réglement des créanciers

Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire rend exigibles les créances non échues (c’est à dire celles qui ne sont pas encore arrivées à échéance).

Le produit de la liquidation est réparti entre les créanciers privilégiés et hypothécaires et ceux bénéficiaires d’une sûreté mobilière spéciale. Pour les autres créanciers, la répartition se fait proportionnellement au montant de leurs créances (c’est à dire au marc le franc).

D) Clôture de la procédure de liquidation judiciaire

Le tribunal prononce celle-ci lorsqu’il n’existe plus de passif exigible ou que le liquidateur dispose de sommes suffisantes pour désintéresser les créanciers ou lorsque la poursuite des opérations de liquidation est rendue impossible en raison de l’insuffisance d’actifs.