Impôts : nouvel avertissement contre l'augmentation des taxes et impôts attribués
Malgré l'intention exprimée par le législateur, une portion de plus en plus grande des revenus fiscaux est directement orientée vers les entités locales, la Sécurité sociale, les médias publics, etc. Le Conseil des prélèvements obligatoires recommande de faire de l'ordre.
Par Sébastien DUMOULIN
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Il semble que le gouvernement ait souvent du mal à garder le contrôle de ses finances. D'année en année, les prélèvements fiscaux et les taxes collectées par le ministère des finances sont de plus en plus destinés à des entités spécifiquement désignées (comme les autorités locales, les organismes de sécurité sociale, les entreprises de médias publics, les agences gouvernementales, etc.), ce qui nuit au budget global.
Dans un rapport diffusé ce vendredi, le Conseil des prélèvements obligatoires (CPO, une entité de la Cour des comptes) a constaté qu'entre 2018 et 2022, la somme de ces taxes et impôts assignés a augmenté de 24 %. Dans leur totalité, ils constituent maintenant 39 % des prélèvements obligatoires (soit 462 milliards d'euros en 2022).
Une interdiction théorique
Cette progression n'est pas surprenante. Elle est la résultante naturelle des choix opérés ces derniers temps. Quand l'administration a diminué ou même éliminé certains impôts, taxes ou contributions, elle a habituellement dédommagé les anciens bénéficiaires en leur allouant une portion équivalente de TVA.
Ainsi, les autorités locales ont été indemnisées pour l'abolition de la taxe d'habitation (20 milliards d'euros), la réduction de la CVAE (contribution sur la valeur ajoutée des entreprises, 8 milliards d'euros) et la contribution économique territoriale (3 milliards d'euros). De manière similaire, la Sécurité sociale a profité d'un transfert pour compenser la diminution des charges sociales (47 milliards d'euros). De la même façon, la redevance pour l'audiovisuel public a été supprimée (3,7 milliards d'euros).
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Cette approche simple suscite des interrogations parmi les spécialistes du CPO. Diriger des revenus fiscaux vers des destinataires prédéfinis peut en effet aider à une meilleure acceptation des taxes par les citoyens. Cependant, cela comporte des désavantages importants : la supervision démocratique des fonds publics est réduite, les ressources attribuées ne peuvent pas être redistribuées en fonction des priorités politiques. Des effets d'opportunisme ou même de revenus fixes se produisent lorsque les sommes allouées dépassent les besoins réels du destinataire et, enfin, le système fiscal dans son ensemble devient plus complexe et moins efficace.
Pour toutes ces justifications, "l'assignation est principalement interdite, et les exceptions sont déterminées et régulées par le Parlement", souligne le mémo.
Au cours des dernières années, les législateurs ont tenté de mettre un frein à certaines pratiques. À partir de 2012, ils ont introduit une limite sur les fonds alloués à certains acteurs étatiques. Si leurs revenus excèdent ce plafond, l'excédent est redirigé vers le budget général. À partir de 2023, cette mesure est supposée s'appliquer à tous les bénéficiaires, à l'exception des collectivités locales et de la Sécurité sociale, sauf exception spécifique.
Cependant, le CPO soutient que ce n'est pas du tout la réalité. En 2024, une somme approximative de 15 milliards d'euros générée par les impôts et taxes sera attribuée à divers organismes sans aucune limite. Ce sera notamment le cas pour la TVA destinée aux entreprises du secteur public audiovisuel (3,7 milliards d'euros), les contributions des employeurs au Fonds National d'Aide au Logement (FNAL, 2,7 milliards d'euros), ainsi que pour les efforts de construction (2 milliards d'euros), etc.
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Les spécialistes du CPO insistent sur le respect des réglementations et la nécessité de fournir des explications pour toute exception. De manière plus large, ils demandent au gouvernement d'arrêter de distribuer des portions de TVA à d'autres entités en dehors des collectivités locales ou de la Sécurité sociale. Le plus important, cependant, est de simplifier le labyrinthe complexe des impôts et taxes actuels.
L'idée d'orienter un unique financement vers plusieurs entités peut rendre la compréhension de leur système de financement complexe. Parfois, la raison derrière certaines affectations n'est pas claire. Comment peut-on justifier que des fonds provenant de la taxe sur l'alcool soient dédiés, non pas à l'assurance maladie, mais à l'assurance retraite ?
Compte tenu du délai accumulé dans la préparation du budget 2025, il est incertain que le gouvernement Barnier commence immédiatement à y travailler, cependant une révision est nécessaire.
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