La conciliation

I. CONDITIONS
A. Qui est concerné ?

Les personnes exerçant une activité commerciale ou artisanale peuvent demander à bénéficier d’une procédure de conciliation.

Remarque : les professions libérales, même celles qui sont réglementées, peuvent bénéficier de la procédure de conciliation. Le tribunal de grande instance est alors compétent.
B. Quand faire la demande ?

La procédure de conciliation s’adresse aux entreprises qui éprouvent une difficulté juridique, économique ou financière, avérée ou prévisible, et qui ne se trouvent pas en cessation des paiements depuis plus de quarante-cinq jours (article L. 611-4 du Code de commerce).

En d’autres termes, les entreprises qui sont déja mais depuis peu de temps en état de cessation des paiements peuvent bénéficier de la procédure de conciliation.

C. Comment faire la demande ?

La demande du chef d’entreprise se matérialise par une requête en conciliation adressée au président du tribunal de commerce qui expose :

  • la situation économique, sociale et financière de l’entreprise ;
  • les besoins de financement ainsi que les moyens d’y faire face.

Cette requête s’accompagne de la remise des documents suivants :

  • un extrait du registre du commerce datant de moins de trois mois;
  • l’état des créances et des dettes accompagné d’un échéancier ainsi que la liste des principaux créanciers ;
  • l’état actif et passif des sûretés (c’est-à-dire les garanties accordées aux créanciers pour le recouvrement de leurs créances) ainsi que celui des engagements hors bilan,
  • les comptes annuels, le tableau de financement ainsi que la situation de l’actif réalisable et disponible, valeurs d’exploitations (c’est-à-dire les stocks et les productions en cours) exclues, et du passif exigible des trois derniers exercices, si ces documents ont été établis.

Il serait souhaitable de déposer également :

  • une situation de trésorerie actuelle et prévisionnelle;
  • un compte d’exploitation prévisionnel;
  • un état de cession d’actifs immobilisés intervenus au cours des 18 derniers mois;
  • un état des inscriptions de privilèges et protêts établi par le greffe au jour de la requête.

Le coût de la requête s’élève environ à 150 € à régler par chèque libellé à l’ordre du greffe du tribunal de commerce compétent.

II. DÉROULEMENT DE LA PROCÉDURE DE CONCILIATION

Dès réception de la demande, le président du tribunal reçoit le représentant légal de la personne morale débitrice ou le débiteur, personne physique, pour recueillir ses explications.

À l’issue de l’entretien, le magistrat désigne un conciliateur par ordonnance. Il définit l’objet de sa mission et fixe les conditions de sa rémunération. La durée de cette procédure est limitée à quatre mois mais elle peut être prorogée d’un mois à la demande du conciliateur. L’ordonnance du 18 décembre 2008 prévoit qu’une nouvelle conciliation ne peut être ouverte dans les trois mois suivant la précédente conciliation.

Remarque : le débiteur peut également proposer le nom d’une personne en particulier.

L’ordonnance est notifiée au chef d’entreprise et au conciliateur par le greffier. Elle est également communiquée au ministère public (article L. 611-6 du Code de commerce) et ne peut faire l’objet d’aucun recours.

A. Pouvoirs du président du tribunal

Le président du tribunal peut obtenir communication de renseignements l’informant sur la situation économique et financière du débiteur auprès du commissaire aux comptes, des représentants du personnel, des administrations, des services chargés des risques bancaires et des incidents de paiement.
Il peut également charger un expert de son choix d’établir un rapport sur la situation économique, sociale et financière du débiteur ou encore obtenir tout renseignement des établissements bancaires et financiers.

B. Nomination du conciliateur
1. Incompatibilités

Le choix du conciliateur ne peut porter sur une personne ayant perçu directement ou indirectement, au cours des vingt-quatre derniers mois, une rémunération ou un paiement de la part du débiteur, d’un de ses créanciers ou d’une personne qui en détient le contrôle ou est contrôlée par le débiteur (au sens de l’article L. 233-16 du Code de commerce).
Le conciliateur fait connaître, sans délai, au président son acceptation ou son refus. En cas d’acceptation, il lui adresse une attestation sur l’honneur mentionnant qu’il ne tombe pas sous le coup d’une incompatibilité.
En outre, cette mission ne peut être confiée à un juge consulaire en fonction ou ayant quitté ses fonctions depuis moins de cinq ans.

Remarque: l’ordonnance de nomination du conciliateur rappelle les cas dans lesquels le débiteur peut demander la récusation du conciliateur.
2. Confidentialité

Comme toute personne appelée à une procédure de conciliation ou qui, par ses fonctions, en a connaissance, le conciliateur est tenu à la confidentialité.

3. Mission
a) Étendue de la mission

Le conciliateur a pour mission de favoriser la conclusion d’un accord amiable destiné à mettre fin aux difficultés de l’entreprise entre le débiteur et ses principaux créanciers ainsi que, le cas échéant, ses cocontractants habituels (fournisseurs, clients, partenaires).
Il peut formuler toutes propositions de nature à garantir la sauvegarde de l’entreprise, la poursuite de l’activité et le maintien de l’emploi.

Le conciliateur peut obtenir du débiteur tout renseignement utile et demander au président du tribunal de commerce de lui communiquer les informations dont il dispose.

b) Fin de la mission

Le conciliateur rend compte au président du tribunal de l’état d’avancement de sa mission. S’il ne peut l’accomplir, en raison du rejet de ses propositions par le débiteur, il peut demander au président du tribunal de commerce de mettre fin à sa mission. De la même façon, le débiteur peut, à tout moment, demander au président du tribunal de commerce de mettre fin sans délai à la procédure de conciliation.

c) Échec de la mission

En cas d’échec de la conciliation, à savoir si les créanciers ne sont pas parvenus à un accord, le conciliateur présente son rapport au président du tribunal. Ce dernier met fin à sa mission et à la procédure de conciliation. Cette décision est notifiée au débiteur (article L. 611-7 du Code de commerce) qui se retrouve dans la situation antérieure à l’ouverture de la procédure. En cas d’aggravation, ce sera la cessation des paiements et l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire (voir fiche sur Le redressement judiciaire).
Cette décision n’est pas susceptible de recours.

4. Rémunération

Après avoir recueilli l’accord du débiteur, le président du tribunal fixe les conditions de rémunération qui comprend les critères sur la base desquels elle sera arrêtée, son montant maximal et le montant des provisions.

III. EFFETS DE LA PROCÉDURE DE CONCILIATION

L’accord amiable conclu entre le débiteur et ses principaux créanciers ainsi que les cocontractants habituels est soit constaté dans une ordonnance du président du tribunal de commerce soit homologué. L’accord constaté n’est pas publié tandis que l’accord homologué est porté à la connaissance des tiers.

Au cours de la procédure de conciliation, l’ordonnance du 18 décembre 2008 prévoit que si le débiteur est mis en demeure par un créancier, le juge peut, à la demande du débiteur, faire application des articles 1244-1 à 1244-3 du Code civil relatifs aux délais de paiement.

A. Homologation

Avant de procéder à l’homologation de l’accord, le tribunal procède à l’audition en chambre du conseil du débiteur, des créanciers parties à l’accord, des représentants du comité d’entreprise ou à défaut des délégués du personnel, du conciliateur et du ministère public.
Le tribunal homologue l’accord que si les conditions suivantes sont réunies :
– le débiteur n’est pas en cessation des paiements ou l’accord conclu y met fin ;
– les termes de l’accord sont de nature à assurer la pérennité de l’activité de l’entreprise ;
– l’accord ne porte pas atteinte aux intérêts des créanciers non signataires.

1. Publicité du jugement

Le jugement d’homologation est notifié au débiteur et aux créanciers signataires de l’accord. Il est ensuite communiqué au conciliateur et au ministère public.
L’accord homologué est susceptible d’appel de la part du ministère public.
Le jugement est déposé au greffe où tout intéressé peut en prendre connaissance. Un avis du jugement d’homologation est inséré dans un journal d’annonces légales du lieu où le débiteur a son siège et dans le Bulletin Officiel des Annonces Civiles et Commerciales (BODACC).

Remarque :
le contenu même de l’accord n’est communiqué qu’aux parties et aux personnes qui peuvent s’en prévaloir.

2. Effet de l’accord homologué

L’accord homologué suspend, pendant la durée de son exécution, toute action en justice et toute poursuite individuelle en vue d’obtenir le paiement des créances qui en font l’objet.

Il entraîne la mainlevée de l’interdiction d’émettre des chèques mise en oeuvre à l’occasion du rejet d’un chèque émis avant l’ouverture de la procédure de conciliation.

Remarque:
les coobligés, cautions ou garants autonomes peuvent se prévaloir de l’accord homologué.

L’homologation de l’accord met fin à la procédure de conciliation.
Saisi par l’une des parties à l’accord homologué, le tribunal, s’il constate l’inexécution des engagements résultant de cet accord, prononce la résolution de celui-ci ainsi que la déchéance de tout délai de paiement accordé.

B. Constatation

L’ordonnance du 18 décembre 2008 prévoit que pendant la durée de son exécution, l’accord constaté interrompt ou interdit toute action en justice et arrête ou interdit toute poursuite individuelle du débiteur dans le but d’obtenir le paiement des créances.

L’accord des parties est constaté par une ordonnance du président du tribunal qui y fait apposer la formule exécutoire par le greffier. La déclaration certifiée du débiteur attestant qu’il ne se trouvait pas en état de cessation des paiements lors de la conclusion de l’accord est jointe à l’ordonnance.

L’ordonnance du 18 décembre 2008 qui entre en vigueur le 15 février 2009 prévoit que les personnes coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent se prévaloir des dispositions de l’accord constaté.

La décision constatant l’accord n’est pas soumise à publicité et n’est pas non plus susceptible de recours. Elle demeure confidentielle et met fin à la procédure de conciliation (article L. 611-8 du Code de commerce).
L’accord constaté et la déclaration certifiée du débiteur qui lui est annexée sont déposés au greffe. Seules les parties et les personnes qui peuvent se prévaloir de l’accord peuvent en obtenir copie valant titre exécutoire.